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Regroupement Communiste      Association des Amis du Manifeste

L'idéologie de l'Etat

9 Février 2007 , Rédigé par ARAM Publié dans #Nos analyses

De la défiance à l’égard  de l’Etat aux luttes nécessaires pour le détruire.

 La démocratie bourgeoise


 Alors que la bourgeoisie masque ses méfaits derrière sa « démocratie », les travailleurs expriment, dans les sondages officiels, leur écoeurement des politiciens. Qualifiés de nantis, de corrompus et d’hypocrites, les élus du « peuple » sont montrés du doigt pour leur incapacité à répondre à leurs besoins. Mais existe-t-il réellement un peuple, uni autour d’une seule idée de la démocratie, comme ses représentants le prétendent à longueur d’antennes ? 

  Pourtant, en bons fonctionnaires du capital, de l’ultra gauche à l’extrême droite,  ils déploient des efforts importants pour promouvoir les idéologies qui servent de bases aux rapports sociaux d’appropriation privés des moyens de production et des conditions de la vie.  La lutte de classe s’exprime en permanence dans les antagonismes accrus entre le pôle de la propriété des conditions de la production et de la richesse et celui « de la classe qui produit le capital même ».

 L’idéologie bourgeoise est forte, ne peut dominer que parce que les rapports de production capitalistes désapproprie les producteurs jusqu’à les priver de leur travail (contradiction fatale pour le capitaliste qui perd ainsi de la plus value absolue donc du capital additionnel nécessaire à la production). Pour illusionner le prolétariat et maintenir son pouvoir, la bourgeoisie produit un système de pensée « fondé sur une réalité, celle des apparences… elle est le développement des fétichismes qui en découlent, même si, bien évidemment force falsifications, omissions, mensonges, manipulations s’y rajoutent aussi. » (Tom Thomas – Conscience et lutte de classe p. 42 –ed.  

Le bourgeois entend régler les comportements sur ses créations que sont l’argent ( monnaie de papier n’ayant plus grand-chose à voir avec une quantité de travail donné),  les marchandises qui s’échangent contre de l’argent de plus en plus dévaluées, les prix qui se fixent en fonction de la péréquation des taux de profit entre branches d’activités, l’économie et la concurrence, les progrès des sciences et des techniques, le salaire qui n’est qu’un reflet du rapport d’appropriation capitaliste qui exprime la dépossession toujours plus grande du travailleur du produit de son travail, la plus-value (création de valeur supplémentaire pour le capital) obtenue par la violence de ses rapports et sa forme la plus fétichisée « le capital porteur d’intérêt[…]où se trouve achevée l’idée du fétiche capitaliste, la conception qui attribue au produit accumulé du travail, et de plus fixé comme argent, la force de produire de la plus-value… » (K.

Marx – Le Capital – III,1, p.55, 56, et 63).  

 

Valoriser le capital avant tout


 Ce ne sont donc pas les sciences et les techniques qui sont tyranniques en soi. C’est l’usage qu’en fait le capital pour produire toujours plus de profits, cause réelle du despotisme et des destructions.  Le rapport de domination entretenu par le capital s’accroît en même temps que la crise dans laquelle il s’est enfoncé ces trente dernières années. La relance du processus d’accumulation est entravée par la dévalorisation du capital financier et monétaire. Si la mondialisation libérale a fourni un temps un ballon d’oxygène à l’ensemble du système de production,  elle a simplement ralenti la tendance à la baisse du taux de profit. La quantité de capital fixe (les machines, les usines) et le travail non productif de plus-value augmentent plus vite que travail vivant productif.  

  Les limites atteintes par un capitalisme devenu sénile sont de plus en plus visibles. Il en est ainsi de l’accroissement considérable de la productivité et de la sous-consommation liée à la baisse des salaires, à la disparition des emplois dans les pays anciennement industrialisés. Les inégalités accrues au sein de la société et les écarts importants entre les pays détenant la puissance financière, militaire et scientifique et ceux qui leur sont subordonnés traduisent le développement rapide d’un prolétariat mondial axé sur cette nouvelle division du travail. 

 


Mais la crise du système, et l’expression de sa maladie, c’est d’abord cette masse de profits qui se réduit à mesure que se développent les forces productives du fait de l’augmentation considérable du chômage et de la précarité.   

Partout en France, par exemple, on brade les vraies richesses, celles fournies par le travail, car on leur préfère des valeurs imaginaires jugées plus réelles, plus vraies (la Bourse, les monnaies…). La valeur réelle des entreprises fusionnées est largement surévaluée du fait des innombrables intermédiaires financiers qui veulent en tirer partie (le Crédit Agricole soutient par exemple la fusion Suez-GDF- beaucoup d’oligopoles se sont constituées dans certains secteurs- par exemple l’énergie ou le militaire). Il en va ainsi des Chantiers de l’Atlantique qui partent en Norvège car ils ne rapportent pas assez à Alsthom mais cette opération  alourdit  sa dette de 350 millions d’euros. Et c’est là que l’Etat, chapeauté par les banques, intervient. Il se substitue à Alsthom afin d’assumer ses dettes et réparer les dégâts comme dans les secteurs de l’aéronautique ou de l’automobile qui ont reçu chacun une manne de 150 millions d’euros.

 L’Etat socialise la plus-value


 Tous les projets gouvernementaux sont des éléments devant assurer la survie de tout le système. Les 66 pôles de compétitivité qui ont reçu 1,5 milliards d’euros de l’Etat permettent de diminuer les coûts de production, de saper les conventions existantes, les statuts qui octroyaient jusque là aux seules entreprises de travail temporaires le droit de vendre des travailleurs à vil prix.La productivité, qui est l’aiguillon interne du capitalisme, permet de baisser les prix réels car la part de capital engagé diminue relativement à celle de la plus-value extraite pour une même valeur produite (une même quantité de travail fournie). La part de la valeur qui va au salaire diminue relativement à celle qui retourne au capital (en Allemagne les salaires ont baissé de 1,5% par an avec une productivité en hausse de 1,5% à 2% chaque année).  


 Le taux d’exploitation augmente en même temps que la plus-value sous sa forme relative du fait de la baisse des prix unitaire des marchandises. Ces hausses de productivité aboutissent à la crise de surproduction. Seulement la masse de plus value obtenue diminue puisqu’il y a moins de travailleurs et c’est ce qui explique le renforcement de l’Etat et du totalitarisme bourgeois.   

La recherche frénétique de la diminution des coûts salariaux aboutit aux suppressions d’emplois. Chez EDF 6000 postes ont été supprimés dès la mise en bourse de l’entreprise. 9000 agents partiront à la retraite cette année et ne seront pas remplacés car la concurrence (1), aiguillon externe du capital détruit les capitaux les plus faibles pour accélérer la concentration. On note aussi que la disparition des postes de techniciens dans l’industrie se fait au profit du secteur tertiaire (non productif), là où les salaires sont au moins 10% inférieurs. Mais les emplois non productifs se retrouvent essentiellement dans la sphère étatique qui gère à la place du privé, trop anarchique, la valorisation du capital.

 Cette gestion collective permet au système de perdurer. Si l’Etat peut accélérer ou freiner une crise il ne peut en aucun cas l’en empêcher. Il assure les tâches générales de la reproduction de la société capitaliste car il dépend exclusivement de la finance pour boucler son budget notamment du fait de l’accroissement de la dette publique.  

 Dévaloriser ou valoriser le capital (privatiser ou nationaliser) c’est le mouvement permanent du capital. Par l’impôt, la dette, l’inflation, l’Etat le socialise et en fait supporter la charge à l’ensemble des travailleurs. Pour ne pas disparaître la bourgeoisie a besoin de l’Etat même si cela doit gêner l’intérêt particulier des capitalistes. Les libéraux comme les étatistes sont d’ardents quémandeurs d’aides de l’Etat pour soutenir le capital (et par là enrichir la masse de ses fonctionnaires) au nom de l’emploi, de la croissance etc…  

 

L’Etat représente l’unité qui n’existe pas dans la société civile bourgeoise et impose l’intérêt général nécessaire à sa reproduction.

 La crise alimentée par l’Etat  

 


 L’Etat concentre son budget sur la justice, l’armée et la police. Devenu une cible de plus en plus visible l’Etat, dont la bureaucratie s’est déconsidérée, s’est restructuré avec la loi de décentralisation. Il fallait éloigner ce centre vital des attaques dont il est l’objet (voir les grandes manifestations des fonctionnaires, des lycéens et étudiants, des cheminots etc…). Les idéologues s’efforcent de le légitimer en louant ses bienfaits (l’Etat pourrait s’occuper des SDF, dixit le(la) candidat(e) aux présidentielles). 

 Ils créent d’autres cibles par des formules de régionalisations et de décentralisations comme si la puissance sociale des individus relevait de critères géographiques, de l’idéologie bornée de la vie locale, pauvre et limitée ! 

 Pour rapprocher un peu plus les pouvoirs de décisions des lieux d’exploitation capitalistes, se développent des administrations indépendantes, non élues (SAN, syndicats de communes, CDC etc…) échappant à l’autorité gouvernementale et constituant autant de rouages du pouvoir de l’Etat qui exonèrent de toutes responsabilités les élus nationaux. Mais là encore ils apparaissent comme des profiteurs qui se servent tout en ne servant à rien. 

 L’Etat n’est plus capable de soutenir la valorisation d’une partie au moins du capital national. Une partie s’avère être du capital fictif (les titres publics et les titres de devises), excédentaire fondé sur des dettes irremboursables. 

 Cela a des effets sur la valeur de la monnaie (la fameuse stagnation, voire le recul de la zone euro) qui est assignation sur la richesse nationale. 

C’est ainsi que pour sauver la valeur monétaire, l’Etat n’hésite pas à sacrifier de la valeur utile (les postes de la Fonction publique par exemple, tous les services publics).   

 Dans le monde marchand seul compte la valeur et non l’utilité.  Il leur faut garantir un contrôle plus rapproché des travailleurs, des chômeurs afin d’abaisser le coût du travail et tenter de l’aligner sur les coûts en vigueur dans les pays pauvres (c’est l’alignement du taux de profit). 

 Les travailleurs paient cette valorisation du capital par l’impôt direct ou indirect. Ils paient les déficits et le service de la dette publique résultante des emprunts et autres obligations d’Etat qui représentent des sommes monstrueuses. Le remboursement de la dette est devenu le second poste au budget de l’Etat avec 40 milliards d’euros juste après l’enseignement avec 56 milliards en 2006 (la dette seule représente 44% du PIB). 

C’est une des raisons des augmentations des taux  à cours termes de la BCE car les prêteurs sont méfiants et veulent refinancer le montant de la dette. Les transferts de charges et exonérations d’impôts pour les entreprises (y compris de l’ISF (impôt sur la fortune) prônés par les politiciens) associés à la retenue sur salaire envisagée pour 2009 doivent couvrir les dégâts occasionnés par les oligopoles et par les propres interventions de l’Etat dans la valorisation du capital (2). Tout cela ne résout pas le problème de la croissance (du capital). Avec une croissance zéro au 3ème trimestre, l’industrie française a reculé de 0,8% par rapport au trimestre précédent. La construction automobile s’effondre (-15%). Le commerce extérieur est toujours déficitaire car l’afflux de capitaux en provenance des Pays en Voie de Développement (PED) occasionne une poussée inflationniste qui pénalise d’autant les capitaux français et européens et en détruit une bonne part.

 La révolution pour seule alternative


 Le capital n’existe que par les prolétaires mais qui les réduit à une telle misère qu’il les oblige à se révolter bien que la plupart se contentent de peu. La productivité capitaliste diminue la part de travail dans les richesses produites et cela met hors circuit la majorité de la population. « Ce que développe le capital, prolétariat et puissance productive, sont pour lui des calamités, et sont exactement en même temps les forces et les conditions d’une communauté future libérée de l’exploitation de l’homme par l’homme. »(Tom Thomas –La crise chronique ou le stade sénile du capitalisme –p. 134). 

La production à grande échelle, la fin de la parcellisation du patrimoine de l’humanité qui laisse entrevoir par les échanges nombreux l’appropriation possible de « l’intellect général » par l’ensemble des travailleurs, l’existence d’un vaste prolétariat mondial contraint de s’unir dans une lutte révolutionnaire pour ne pas être « hors circuit » par le capital, posent les bases de l’écroulement  de la production reposant sur la valeur d’échange et aura comme première condition le renversement du pouvoir d’Etat bourgeois.  

 

 

 

Pierre Lehoux –janvier 2007

 (1) Les oligopoles exploitent dans les PED les chercheurs et les cadres dont ils ont besoin pour encadrer une main-d’œuvre surexploitée en Asie et en Europe de l’Est

 (2) Actuellement les prélèvements obligatoires représentent 43,7% du PIB (impôts et cotisations sociales réunis).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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